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Photo du rédacteurVincent Pessama

Les aphorismes euphorisants de Pascal Weber

Picorer des pensées humoristiques, grignoter des mots savoureux et s'évader dans un monde poétique.... voici ce que Zizanie dans le métronome, le dernier ouvrage de Pascal Weber, vient de m'offrir.

Présentation


Ce recueil composé d'un millier d'aphorismes délicieux vient de paraître chez un éditeur belge spécialisé dans la forme brève : le Cactus Inébranlable.


Je vous en cite quelques-uns qui sont déjà surlignés dans mon exemplaire :

L'impossible n'est que le difficile faisable à plus ou moins long terme.
Des amoureux pondérés, acceptent de s'épouser, seulement à mi-distance du meilleur et du pire.
Il se suicida deux fois, la première pour voir, la seconde parce qu'il n'avait pas trop bien vu.
La poule pondeuse est la grand-mère de l'omelette.
Trop de toits tuent le ciel.
Entre les gouttes de pluie, il ne pleut pas.
Vous me croirez ou non : Dieu existe peut-être.

Cette récente parution est l'occasion de vous faire découvrir un auteur créatif, que son éditeur définit comme « Un homme libre qui adore la contrainte ! ». Il a gentiment accepté de répondre à mes questions, je vous laisse donc en compagnie de ses réponses.

Il nous parle de désemmerdement, de contemplation, de Surréalisme et de ses projets d'écriture.


L'interview


Quels ont été vos premiers pas dans l'écriture ?


C’est probablement vers l’âge de douze, treize ans que j’ai balbutié mes premiers pas plutôt sérieux, bien qu’assez malhabiles, entre Boris Vian, lequel me tenait la main droite, et Raymond Queneau, qui me serrait la gauche, en sus sous la vigilance d’Eugène Ionesco, d’Alfred Jarry en particulier. Plus loin, ces pas, tout en grandissant et s’affermissant, m’ont conduit – de façon quasi naturelle, dirais-je – sur les sinueux chemins de la ‘Pataphysique, de l’Oulipo, du Surréalisme, vous voyez le genre. Depuis cette joyeuse promenade, je n’ai jamais cessé de lire ni d’écrire. Et pas qu’un peu.

Qu'est-ce qui vous a amené à cette forme d'écriture brève ?


D’emblée, deux mots me viennent à l’esprit : urgence et facilité. L’urgence vu qu’à un moment donné de ma vie, et pour la toute première fois, j’ai eu besoin d’avoir très vite un livre papier entre les mains. La facilité étant donné que, pour ce faire, je n’ai rien eu à créer, absolument rien, il m’a suffi de fouiller parmi mes nombreux écrits d’antan afin d’y puiser certains textes. C’est là, au fil des mes fouilles, que je me suis rendu compte qu’une forme brève spécifique revenait plus souvent que les autres – je n’en avais pas eu conscience auparavant -, forme simple d’aspect, basée sur quelques contraintes assez légères, voire enfantines.

Avez-vous des thématiques de prédilection ?


Je ne sais pas trop, j’avoue que je n’y ai jamais vraiment réfléchi. Disons, en vrac et sans exhaustivité, que je parle souvent de l’enfance, de l’adolescence dans mes récits, s’y retrouvent presque toujours le non-conformisme, la force de la rêverie, la curiosité, la foi, pas spécialement dans son acception religieuse, l’émerveillement perpétuel, l’esprit de rébellion, la vie rurale, l’amour éternel, la solution imaginaire, la « simple » vie, principalement de ceux et celles qui vont debout en refusant la dictature ordinaire, surtout celle imposée par les adultes chiants, ultrasérieux, les bouffeurs de parapluies, les coincés du derrière pour la plupart, prêts à redresser tout ce qui aspire à se courber un tantinet, vachement, à la fol... mais je m’égare et me coupe moi-même la parole. Je ne sais plus qui a dit – sinon écrit – un jour, André Stas peut-être, qu’il ne cherche jamais dans ce monde qu’à se désemmerder. Au travers de mes livres, ce fameux désemmerdement, c’est également ce à quoi j’aspire toujours.

Où puisez vous vos idées ? Pouvez-vous nous parler de votre processus créatif ?


Pour les idées, je dirais un tiers dans l’observation quotidienne des petites choses de la vie, que certains qualifieraient d’anodines, d’inintéressantes, la contemplation du minuscule, un autre tiers dans l’art, globalement la littérature et la musique, un dernier dans mon propre univers onirique. Pour l’inspiration naissante, je ne sais pas trop, je n’ai pas de recette particulière. Disons que peux être inspiré partout, tout le temps, seul ou en groupe, il n’y a pas de règle précise. Je n’ai pas besoin d’être dans telle ou telle condition spécifique pour créer. Mon processus de création suit presque toujours le même schéma : j’opte pour une contrainte principale (un roman « incolore », par exemple), souvent accompagnée de sous-contraintes ; d’habitude en parallèle j’établis un plan, un graphique, un cheminement ; j’écris alors les fragments d’un puzzle à construire, les uns à la suite des autres, sans ordre précis, souvent ça donne une liste interminable, parfois longue de plusieurs milliers de pages ; enfin je classe ces bribes suivant leur destination dans le récit, puis m’astreins à composer ce puzzle. En gros, voilà le parcours. Bien entendu, je parle ici des textes relativement longs, pour lesquels, vous aurez compris, je ne respecte jamais l’ordre « classique » : début, milieu, fin. J’élabore en outre des lexiques originaux qui me serviront éventuellement plus tard pour tel ou tel écrit.

Quels sont les auteur.e.s qui vous ont donné envie d'écrire ? Êtes vous influencé par un courant spécifique ?


Chez moi, ce sont toujours les trois mêmes noms qui reviennent : Boris Vian, Raymond Queneau, Eugène Ionesco. Je ne sors pas de là. Leurs écrits ont indubitablement influencé l’adolescent que je fus, le nier serait un fameux mensonge. Mes premiers romans étaient assez vianesques, mes bouts théâtraux ionescoïdes. D’autres auteurs comme Georges Perec, François Cavanna, Pierre Desproges, je ne vais pas les citer tous, se situent pas loin derrière. Sous ces noms se profilent, désolé si je rabâche, l’Oulipo (ouvroir de littérature potentielle, j’avais omis de le préciser), la ‘Pataphysique, le Surréalisme, le Suronirisme, etc. J’adore lire, est-il besoin de vous le préciser ? Il fut un temps où je dévorais au minimum trois livres par jour. Ça pouvait aller des mystères ou des énigmes en chambre close (pour l’instant, je suis en train de lire l’intégrale de J. Barine), aux récits de science-fiction, aux histoires fantastiques… Dans le domaine plus pointu des aphorismes, je suis récemment tombé sous le charme des écrits de Jean-Philippe Querton, qui se trouve être mon éditeur, de ceux d’autres artistes comme Ylipe, Achille Chavée, Jacques Sternberg, André Stas, et j’en passe tant il s’en trouve de géniaux.

Quels sont vos prochains projets liés à l'écriture ?


Oh ! des projets, j’en ai tellement, tellement en stock qu’il me faudrait un paquet de vies supplémentaires pour les mener tous à terme. Je sais déjà que ce sera impossible. À présent, je me consacre à l’écriture d’un cinquième recueil d’aphorismes, basé sur les mêmes contraintes que ses quatre prédécesseurs. Ensuite je mettrai la dernière main à un florilège de textes courts sur le thème de l’oiseau, illustré par mon épouse et qui devrait s’intituler « Le Lent Gage des Oiseaux » (les initiés comprendront). Alors seulement je reviendrai à mes premières amours, le roman. J’en ai (au bas mot) quatre en préparation. L’un d’eux sera ce que l’oulipien Olivier Salon, avec qui je corresponds épisodiquement-épistolairement depuis quelques années, appelle mon Grand-Œuvre, un récit en quatre parties distinctes que j’ai entamé en 2003 et toujours pas terminé ; son titre sera L’Équinancie, ou Esquinancies, il me reste à trancher. Pie(s) est le roman « incolore » précité. Après tout ça, si je ne suis pas devenu gâteux, et si la Nature m’en laisse le temps, ça va sans dire, je compte relire entièrement ma production de jeunesse, laquelle poireaute dans mes tiroirs depuis des lustres, éventuellement en réécrire une partie destinée à la publication. Mais une étape à la fois.


D'autres ouvrages


Pascal est aussi l'auteur de Onze Lettres (2017), Eleven Notes (2018) & Volume Trois (2019), trois livres édités aux Associations Bernardiennes.


Bonus


Concluons cette incroyable rencontre en quelques pensées extraites de son dernier livre.

Vous trouverez d'autres citations visuelles sur son blog.

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